Dionysos - Zénith 3 novembre 2008
A ceux qui doutaient encore que du fait que La Mécanique du Coeur est un album rock, ce concert était pour vous.
J'ai déjà évoqué brièvement ma rencontre musicale avec le groupe ici et il est vrai que leur Mécanique m'avait laissée un peu perplexe. Je n'ai jamais réussi à me plonger autant dans ce disque que dans ses prédécesseurs. La maturité du groupe qui s'esquissait ne présageait pour moi rien de très excitant et la confirmation que Luc Besson allait se charger de la version cinématographique du roman de Mathias encouragea un peu plus mon scepticisme.
Néanmoins, puisque le personnel de mon ancienne boîte avait décidé de m'offrir une place de concert pour mon anniversaire, je ne me suis pas fait prier pour retrouver Dionysos sur scène.
Arrivée sur place un peu en retard, ce qui n'est jamais une très bonne chose lorsqu'il s'agit du Zénith, j'ai vite compris mon erreur. Une foule écclectique encombrait déjà la fosse, et j'avais manqué la première partie. Comme pour tout concert de Dionysos, l'ambiance était plutôt bon enfant et me laissa tranquillement me remettre dans le bain, parce qu'à chaque fois qu'ils se produisent quelque part, que ce soit la première ou la dixième fois que l'on assiste au spectacle, on a toujours un peu l'impression de retrouver de vieux copains.
A l'origine, le groupe avait prévu de faire une série de concerts dans une salle bien plus petite (Les Folies Bergères) pour clôturer en beauté la tournée de la Mécanique du Coeur, et de réunir sur scène tous les artistes ayant participé à l'album. Mais les difficultés d'organisation d'un tel projet en raison des emplois du temps de chacun, ainsi que de la capacité de la salle, incompatible avec les attentes d'un public parisien en croissance perpétuelle, ont finalement eu raison de ce joli rêve et Dionysos opta pour une date unique au Zénith.
Le décors avait été assez travaillé : deux horloges moyennes, et une plus grande qui diffusait des images des clips ornaient la scène et les guirlandes lumineuses qui s'étendaient de part en part au milieu d'instruments de musique divers et variés annonçaient un orchestre d'envergure.

Soudain, Mathias Malzieu et ses musiciens entrèrent sous les cris de joie de la foule et ils débutèrent le set avec
un King of the Ghost Train des plus énergiques qui me confirma que Dionysos n'avait rien perdu de sa fougue. Tout en gesticulations arythmées et en mimiques furieuses, Mathias arpentait le plancher au milieu de musiciens tout aussi agités que lui : guitaristes, violoniste, trompettistes, batteur et autres l'accompagnaient à merveille en dansant comme des pantins désarticulés.
Ils enchaînèrent sans transition avec le titre d'ouverture de l'album : Le Jour le Plus Froid du Monde tandis que les horlogent se mettaient à tourner et à carillonner à l'unisson.
Première déception : passé l'effet d'excitation de début de concert, nous avons constaté à regret qu'Emilie Loizeau n'était pas là pour assurer sa partie chant sur ce titre et elle fut remplacée au pied levé par l'infaillible Babet. Il faut dire que j'avais emmené avec moi mon lot de questions pour la soirée. Qui répondrait présent à l'invitation de Dionysos ce soir ? Y aurait-il une mise en scène, comme l'histoire du disque et du livre permettait de l'envisager ? Joueraient-ils des chansons de leurs anciens albums ?
Cette dernière interrogation trouva une réponse dès le troisième titre. Après nous avoir souhaité la bienvenue à tous, Mathias nous expliqua, avec ses qualités de conteur habituelles, que la chanson qui allait suivre avait déjà gonflé le toit du Zénith deux ans auparavant, jusqu'à le transformer en montgolfière et que celle-ci s'était envolée au dessus des toits de Paris. Cependant, pour que cette étonnante transformation ait lieu, il fallait que l'assemblée fasse le plus de bruit possible (ce qu'elle fit, bien évidemment).
Et après nous avoir félicités chaleureusement, il se lança dans une Song for a Jedi féroce qui eut pour effet de nous replonger automatiquement dans le bain (ça remet les pendules à l'heure, pourrait-on dire).
Bref, la sueur commençait déjà à perler sur le front rouquin de Mathias, et la température dans la salle monta de quelques degrés. Nous, au milieu, on rêvait de dire "pouce" pour respirer dans la fournaise et reprendre nos esprits, mais c'était sans compter sur la première surprise de la soirée qui survint avec Cunnilingus mon Amour lorsque Rossy de Palma déboula sur scène avec Babet qui s'était changée pour la chanson. Toutes les deux imprégnées de leurs personnages, elles firent belle impression et la foule, partagée entre l'envie de chanter avec elles et d'étouffer un fou rire, ne se fit pas prier pour reprendre en coeur "Cunnilingus mon amour" (collectivement, puis les hommes contre les femmes). Mathias nous affubla du titre de "Champions du monde de Cunnilingus" pour l'occasion.
Peu après, Mathias fut rejoint par un Arthur H hilare et visiblement en forme qui reprit plusieurs fois le refrain de When the Saints Go Marchin' In pour faire durer le plaisir avant de se jeter dans la foule à l'instar de son acolyte qui a, lui, l'avantage d'être un habitué de la chose. J'ai donc envie de dire ici "comme d'habitude", les musiciens assurèrent l'intérim sur la scène tandis que les deux autres, heureux comme des gamins, se laissaient porter par la foule d'un bout à l'autre de la fosse.
Ils remontèrent sur scène en s'épongeant le front, se tombant dans les bras l'un de l'autres comme de vieux camarades d'internat et Mathias nous demanda d'applaudir Arthur pour la performance que représentait son "premier slam".
Une Symphonie pour Horloge Cassée plus tard, la compagne de Mathias, celle qu'il appelle la "Femme Chocolat" (Olivia Ruiz, pour ceux qui n'auraient pas compris) vint le rejoindre dans une robe blanche magnifique qui la mettait particulièrement en valeur, pour le flamenco de Candy Lady qu'ils interprétèrent en duo.

Nous eûmes droit à notre petit intermède avec le traditionnel La Métamorphose de Mister Chat et comme d'habitude (oui, encore, et non, je ne suis pas blasée) le public fut convié à un nouveau championnat du monde de "Ta Gueule le Chat" que nous remportâmes haut la main, devant la Zénith d'il y a deux ans. Il faut cependant noter que la promesse de Mathias ("Si vous arrivez à faire mieux, on recommence le concert du début et on joue jusqu'à 1h37 du matin") n'a malheureusement pas été tenue. Pour les choeurs de la fin, le groupe appela sur scène Coming Soon (la première partie que j'avais loupé) et de la chanteuse d'Houdini.
Olivia revint ensuite pour chanter Flamme à Lunette, accompagnée de Mathias au ukulélé et ils terminèrent A capella. La complicité entre ces deux-là crève indéniablement les yeux. Ils sont vraiment très... mignons.
Reprenons le fil du concert, après cette petite parenthèse sentimentale si vous le voulez bien. Les tourtereaux ont continué sur leur lancée avec le très agaçant Tais-Toi Mon Coeur au milieu duquel ils ont glissé quelques bribes de Miss Acacia et Mathias nous lança : "au revoir et bonne nuit ! ... Ou pas !".
La fosse devenait un vrai sauna et les premiers malaises commencèrent. Dommage pour ceux-là, ils n'eurent pas le temps de voir arriver Grand Corps Malade, avec son long manteau et son haut de forme. Franchement, il fouttait vraiment la frousse le Joe, avec sa grosse voix. Mais heureusement, le petit Jack/Mathias arriva derrière-lui pour lui faire la peau (enfin plus exactement lui crever un oeil).
Enfin, le traditionnel Coccinelle de la fin retentit. La fin du concert approchait et à ce stade, nous n'attendions plus de surprises. Les espoirs de voir Jean Rochefort et Alain Bashung s'étaient donc évanouis. Mathias mêla cette fois sa chanson de clôture avec un petit Smell Like Teen Spirit du meilleur effet, et se lança à nouveau dans la foule à corps perdu. Cette fois, il traversa le Zénith de haut en bas, il monta jusqu'en haut des gradins avant de redescendre par la fosse sans jamais poser un pied (ni une main) par terre. L'expérience dût être éprouvante, car il revint sur scène plus mort que vif.

Il eut tout juste le temps de se remettre avant qu'un Eric Cantonna très élégant, qui réussissait à peine à masquer son trac, vienne réciter comme sur le disque l'épilogue de ce joli conte. Mathias nous annonça alors être ravi d'avoir pour la première fois sur scène avec lui le vrai Giant Jack. et termina le concert pour la deuxième fois avec un Giant Jack des plus endiablés, repris par tous les invités du groupe qui revinrent ensemble pour le grand final (séquence émotion).

Il fallu encore quelques applaudissement supplémentaire pour que Mathias Malzieu remette une dernière fois les pieds sur scène pour venir interpréter tout seul et a capella Tokyo Montana, que le public chanta avec lui d'une seule voix.
Et le concert s'acheva enfin, me rappelant à la réalité et au mal de dos terrible qui me tenaillait (il est de plus en plus difficile de passer 2h30 dans la fosse et d'en sortir indemne), me laissant le sentiment d'avoir assisté à la fois à un concert, un spectacle de cabaret, un opéra-rock et un conte musical. Dionysos s'en est admirablement sorti et m'a définitivement convaincue de la crédibilité de leur Mécanique du Coeur et qui sait, après avoir lu le livre, écouté le disque, vu le spectacle, peut-être irai-je un jour voir le film ?